Elle (Claire)  hocha la tête et sortit d'un pas mal assuré. Quant à moi je suivis l'odeur de café et trouvai à la cuisine un festin destiné à me donner l'énergie nécessaire à cette nouvelle nuit de travail.

• - Tu es un ange, roucoulai-je en embrassant Aiden. Il réfléchit un moment tandis que j'engloutissais mes premières gorgées de café, et finit par m'avouer :

• - Ça me fait peur. Ne t'habitue pas à une idée fausse.

• - Je vois, souris-je, mais en moi même c'était la colère qui grondait. Je vais faire en sorte de ne pas être avec toi. Faisons semblant de ne pas être un couple, tu as raison, ce sera tellement plus confortable. Il tendit la main par dessus les tartines et la posa sur mes doigts, eux mêmes occupés à enserrer ma tasse. Il l'amena ainsi à sa bouche.

• - Ça me va, conclut il lorsqu'il eut avalé quelques gorgées de mon café, les yeux rivés aux miens.

• - De quoi as tu peur, Aiden?

• - De ne pas y arriver, répondit-il du tac au tac.

• - C'est évident que si tu refuses d'y croire, tu n'y parviendras pas. Je vais te laisser finir seul, tu auras moins l'impression que c'est un petit déjeuner en tête à tête avec moi.

  Joignant le geste à la parole, je saisis une tartine et l'emportai à la salle d'eau. Je l'abandonnai dans la poubelle qui s'y trouvait, j'avais le ventre noué soudain. Je ne pris aucun plaisir pour une fois à sentir le flot brûlant de l'eau sur moi. J'ignorai le jeune homme qui ne perdit aucun détail de mon rituel du matin. Quoiqu'il fût plus de vingt heures. Lorsque je fus habillée et prête à partir je sentis mon estomac se tordre à l'idée de m'éloigner de lui mais je pris courage pour traverser la pièce et siffler Mistral, ma dague au côté. Aiden se saisit de mes hanches, m'arrachant un cri de surprise. Je me paralysai sous la caresse de ses doigts sous ma veste, tout contre ma peau. Sages, ils ne visitèrent que mon dos et mon ventre, mais un soupir de plaisir m'échappa pourtant. Je tendis le bras pour caresser le museau du grand animal qui venait d'arriver au balcon. Lorsque Aiden posa un baiser dans mon cou je n'en pus plus. Je me retournai pour l'embrasser d'un geste passionné et désespéré.

• - Je n'ai jamais autant aimé une femme depuis cette nuit là, me dit-il en me transperçant de ses yeux émeraudes. Dis moi que cela te suffit.

• - Jamais. Fais toi immédiatement à l'idée que jamais je ne pourrai me satisfaire de cela. Tu peux lui échapper. Je vais t'aider. Mais ne nous sous estime pas. A ce soir.

• - Fais attention à toi. As tu conscience, ajouta-t-il lorsque je sautai sur le dos de la dragonne, que tu vis déjà comme eux? Il est vingt et une heures trente. Tu prends le travail.

• - Je les aime déjà, répliquai-je, butée. En dépit de cela, conclus-je en pointant le doigt sur ses épaules. Ils sont comme nous. Des bêtes sauvages pour peu qu'on les délaisse un peu trop. En quoi sommes nous meilleurs que cela?

Il secoua tristement la tête et j'eus l'irrépressible envie de lui balancer mon amour à la figure. Mais j'étais plus exigeante que cela. Alors je lançai ma monture vers les cieux. Déjà concentrée sur ma mission je récapitulai : dans ma poche je récupérai mon mobile. Claire ronchonna mais me dicta l'adresse, allant jusqu'à me guider pour trouver le château de l'ennemi. Avant de raccrocher elle m'ordonna d'en rester à l'observation, et j'avouai que je comptais aller un peu au delà. Elle haussa le ton mais finit par avouer que mon plan n'était pas si risqué. Je voulais libérer les licornes. Pas vraiment pour causer un handicap aux troupes adversaires, mais simplement pour leur donner un coup au moral. Toutes les deux, plus tard dans la nuit, nous entrerions pour chercher Ceara si elle était toujours là.

Lien Le péché pour leur vie 59.