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Le destin des immortels - nouvelle publication

• - Non, à tout à l'heure, je vais écrire le premier message dès que je serai propre, le reprit-t-elle lentement. Que disait celui-là ?

• - Aucune idée, il est à la poubelle, si tu le veux.

Elle serait allée le chercher, tous deux en étaient conscients. Elle se demanda s'il aurait ressenti un plaisir sadique à la regarder écarter les déchets, gênée par l'odeur putride amplifiée par ses sens si développés.

• - Je ne te crois pas, contra-t-elle pourtant. Tu l'as forcément lu pour voir si Sloan est dangereux pour toi.

• - Pour la meute, corrigea-t-il aussitôt. Moi ça va, merci, Shalimar.

Il marqua une pause, durant laquelle elle se sentit évaluée, comme s'il cherchait à déterminer si sa vie à elle valait la peine des efforts qu'il fournissait à cause d'elle. Elle se sentit plus légère, comme si elle était déjà morte. Ce qui était d'ailleurs le cas, songea-t-elle amère. Il reprit la parole à voix basse :

• - C'était : « Si, tu es trop forte, Claudia est moins belle que toi, bonne soirée à toi. Quand est-ce que je te revois ? » Ce gamin ne sait pas écrire un mot correctement, mais il est déjà à tes pieds. Évite de les prendre au berceau, si tu es rattrapée par la justice on risque d'être découverts.

Évidemment, une gardée à vue partant en fumée au premier rayon de soleil risquait d'éveiller quelques soupçons s'agissant de leur nature de créatures mythiques.

• - Oui, chef, se soumit-elle sagement.

• - Mmm, redis-le, c'est si rare dans ta bouche, fit-il remarquer méchamment.

Elle sentit l'attaque stimuler sa nature de tueuse, mais calma ses instincts prédateurs, afin de demeurer parfaitement calme, consciente qu'il la provoquait. Il ne serait pas plus conciliant si elle réagissait mal.

• - Tu m'as planté un couteau dans le ventre, ce soir, lui rappela-t-elle pour justifier sa difficulté à calmer ses nerfs, obstinément à vif.

La fin de sa phrase s'envola dans le vent car le mobile de l'immortel sonnait. Soucieux (Soucieux!!), Sofiane se mit à arpenter la pièce et économisa ses mots. Il raccrocha les doigts un peu tremblants, ce qu'elle trouva exceptionnel. Il la jaugea un instant. Elle ne l'avait jamais vu ainsi, mais c'était parce-qu'elle n'avait jamais partagé son quotidien. Ils n'avaient acquis leur complicité que de par leurs disputes passées, qui avaient été épisodiques, jusqu'alors.

• - Les chasseurs sont en train de forcer la porte d'une de nos maisons de couverture. J'y vais immédiatement. Il y a un autre jeu de clefs dans cette boite... Peut-être à plus tard.

• - Sofiane ! Hurla-t-elle alors qu'il sortait déjà de chez lui.

• - Quoi, Shalimar !

Une rage sourde résonnait du fond de la poitrine du vampire. Elle prit peur, contre toute logique.

• - Attends-moi ! Implora-t-elle en haussant les épaules, dans un frisson qui n'échappa pas à l'immortel.

Il soupira, satisfait, puis lui lança des ordres courts et précis. Sous sa direction elle se saisit de deux grands couteaux. Ils montèrent en vitesse dans le petit bolide de Sofiane et il lui parla pour la première fois depuis bien longtemps du ton qu'il réservait à ceux qui l'épaulaient.

• - Tu ne fais plus partie de la meute, tu n'es pas obligée de venir, Shalimar.

Le contraste entre les mots et le ton de sa voix la laissa muette. Puis elle força le nœud qui s'était formé dans sa gorge.

• - Tu aurais fait la même chose pour moi, affirma-t-elle, en forçant le timbre de ses paroles, pour paraître plus assuré qu'elle ne l'était en réalité.

À présent il ne paraissait plus complice, il s'était endurci. Elle réalisa avec soulagement qu'il jouait la comédie, même lorsqu'il ajouta ces mots :

• - En aucun cas, Shalimar, car justement, tu ne fais plus partie de la meute. A quoi crois-tu que cela servirait sinon ?

Elle s'apprêta à le contrer de manière frontale, mais elle se retint. Il demeurait son chef, elle le craignait plus que quiconque. Elle ne craignait pas même les rayons du soleil plus que lui. Parce qu'il pouvait la torturer bien plus gravement que ces derniers.

• - Tu m'as soignée chaque fois que tu m'as fait souffrir. Donc je n'en crois rien, expliqua-t-elle prudemment.

• - Ce que je fais dans ma vie privée n'a rien à voir avec le travail. Si j'avais appris que les chasseurs t'avaient prise en chasse je n'aurais pas bougé le petit doigt.

  Le destin des immortels - nouvelle publication - 13.