Résumé du péché pour leur vie.
Je hurlai comme une damnée que j'étais, pour l'avertir de loin, aussi sortit-il de la chambre, nu comme un ver, trempé. Il avait dû penser avoir le temps de prendre une douche avant de nous récupérer, Prince et moi. Belle preuve de confiance, mais en l'occurrence cela avait été malheureux. Je me jetai à son cou, avec le réflexe débile de la femme en danger. Je hurlai à Prince de rester derrière le roi. Enfin la meute stoppa, la bave aux lèvres, grondant d'une seule voix.
-
- Je ne fuyais pas, je ne fuyais pas ! Me perdis-je !
Cela dut sonner vrai, car je sentis la colère exploser à son esprit.
-
- D'accord, dit Kenzo, je n'ai pas prévenu tout le monde, mais Callista est libre en ces murs, ce soir, sachez-le. Je vais considérer que c'est un malentendu, et qu'aucun de vous n'en voulait à la rançon d'un million d'euros promise par mon rival. Mais le prochain qui touche à l'un de ses cheveux subira ma colère !
Les loups firent demi tour, la tête basse. Je tournai la tête pour trouver celle de mon sauveur... A moins d'un centimètre, puisque j'étais toujours dans ses bras. On recule, Callista, on recule, m'ordonnai-je.
Il me demanda d'attendre cinq minutes le temps d'enfiler quelque chose. Puis il me montra ma chambre, magnifique, au demeurant : les teintes orange sanguine la rendaient chaleureuse. Les fresques qui ornaient les murs formaient de merveilleux trompe l'œil, on se croyait au milieu des vignes.
-
- Vous n'avez pas peur que je m'échappe cette nuit ? M'étonnai-je.
-
- Tu as dit qu'on faisait une trêve jusqu'à demain, grogna Kenzo.
-
- Et je respecterai ma parole, souris-je. Merci pour tout à l'heure.
Il hocha la tête et après une hésitation il disparut dans les couloirs.
-
- C'est le tutoiement des ennemis ou celui de la sympathie ? Le taquinai-je alors qu'il venait de tourner au loin.
-
- Sans doute les deux, fit-il sans croire que je pouvais l'entendre.
Après un instant de flottement, Prince s'ébroua ; je l'imitai mentalement. Je m'extasiai sur le contenu de la salle d'eau, qui recelait de crèmes et soins en tous genres. Puis je détaillai la garde robe, riche en robes et étoles. Mais bientôt le sommeil me prit ; je me coulai entre les draps de coton, enroulée contre Prince. Je lui parlai longtemps ; nous arrivâmes à la conclusion que je pouvais essayer de rester, pour voir si je m'y faisais. Il serait toujours temps de partir plus tard. Nous avions été longtemps seuls, à présent cela nous changerait de tenter autre-chose. Après tout c'était moi-même qui m'étais plainte de l'ennui qui guettait les vampires, passée l'excitation des premières centaines d'années.
Le lendemain je fus réveillée par des coups insistants frappés à la porte. Finalement Léila ouvrit précautionneusement ; dit timidement que je pouvais venir les rejoindre, son père et elle, au salon pour le petit déjeuner.
-
- Attends, m'empressai-je de la retenir. Quelle heure est il ?
-
- Dix heures, Callita.
-
- Alors tu dois m'attendre, il faut que nous passions par les souterrains. Je ne les connais pas encore assez pour m'y retrouver seule.
Elle attendit tandis que je faisais une rapide toilette. Ensuite je cherchai quoi mettre sous ses yeux rieurs. Tout me paraissait bien trop habillé ; finalement elle vint choisir pour moi. Je regardai incertaine la longue robe dorée toute en nœuds noirs et au décolleté plongeant.
-
- C'est un petit déjeuner, notai-je, ça ne convient absolument pas, demoiselle !
-
- Papa s'en fiche, et j'aimerais revoir cette robe portée par une femme qui ne cherche pas le pouvoir. Quelqu'un qui la porterait en toute humilité.
-
- Comment cela ? L'interrogeai-je suspicieuse.
-
- Cette robe appartenait à sa mère, et depuis qu'il règne, toutes les femmes qui l'ont eu pour amant ou pour époux l'ont immédiatement choisie d'elles mêmes. Il a toujours été déçu, et j'ai toujours pensé que le jour où le résultat lui plairait, cette femme là serait celle qu'il aimerait.
Je comprenais : c'était une étoffe magnifique, mais lorsque vous aviez vu votre mère dedans, vous idéalisiez sans doute l'image que vous en aviez. Alors la voir portée par une personne à l'aura désagréable devait être des plus désagréable. La jeune femme tenait sans doute la bonne interprétation. Cependant, je ne convoitais pas le rôle d'une quelconque Cendrillon.
-
- Il y a un détail que tu n'as pas compris. Je n'attends aucune faveur de cet ordre de Kenzo. En aucun cas, Léila.