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- J'ai envie de chasser des inconnus que je ne reverrai plus jamais. Sans que des dizaines d'affreuses créatures...
Je sentis le dépit et la colère monter en lui, puisqu'il en était.
- … Soient là me surveiller en me gâchant tout le plaisir, conclus-je comme si de rien était.
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- Ce sera ton seul compromis. En contre partie de la sécurité de mon peuple, Callista, ne peux-tu pas faire un pauvre compromis ? Tu n'es pas bien ici ?
Je l'aurais été si j'avais accepté de me livrer à ce fichu flirt, réalisai-je. Cela aurait si bien tenu l'ennui à distance ! Et ensuite ? Kenzo était déjà conquis, comme n'importe quel homme à cause de ce physique tellement parfait. Il serait un compagnon, voire un époux tendre et docile. Tout ce qui me faisait une peur bleue. Je voulais quelqu'un qui verrait au-delà de mon physique parfait, qui s'en moquerait, qui n'aurait pas peur de me perdre en m'opposant de la résistance. Quelqu'un qui me critiquerait, qui verrait en moi le fauve et non la façade.
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- J'y suis bien, si. Mais il manque... Tu sais, le sel, en quelque sorte.
J'étais sûre qu'il se vexerait. J'avais voulu qu'il se vexe, qu'il me haïsse pour ma méchanceté. Mais ce ne fut pas le cas.
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- Je sais, oui. Avant d'être roi j'aidais mon père à tenter d'obtenir le pouvoir, et c'était excitant. J'avais de vrais amis, et je butinais toutes les femmes que le Diable mettait sur ma route. Ensuite je suis devenu roi. Et la vie a perdu ce sel dont tu me parles.
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- Pourquoi ?
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- Les femmes se jettent entre mes bras non plus parce que je suis beau...
Je tressaillis. Puis je maîtrisai mon corps pour que le sourire que m'avait inspiré ma réaction ne se dessine jamais. Il devrait le faire plus souvent, songeai-je. Être cru et choquant. Cela lui allait bien.
- Désolé, mais tu dois savoir ce que c'est. A force que tes partenaires te le répètes, d'abord tu finis par le croire...
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- Et ensuite tu détestes l'entendre, poursuivis-je pour lui, parce-que tu aimerais entendre autre chose, de temps en temps. Comme tu es intelligent, tu est intéressant, tu es drôle... Ou alors tu es une ordure, ta mère a raté son coup... N'importe quoi d'autre...
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- Exactement. Donc elles ne se perdent plus entre mes bras pour ça, non, mais pour le pouvoir. La première a été loyale. La paix entre nos clans s'est faite puis comme prévu nous nous sommes séparés au bout de neuf mois. La dernière m'a trahi, soit. Mais en tout état de cause, plus aucune femme ne me donne de raison de vivre, à part Léila, bénie soit elle. Et je n'ai plus d'ami. J'ai des hommes sous mes ordres mais n'importe lequel pourrait être le traître.
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- Même Lorenzo ? M'étonnai-je.
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- Bien-sûr, même lui. J'ai surpris nombre de conversations où ma mort ne gênerait personne, puisqu'ils seraient aux premières loges pour dire qu'ils m'avaient tué de leurs mains.
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- Tu exagères. Les dix hommes se sont battus pour toi ce soir.
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- Parce-que j'avais une chance de m'en sortir. Sois certaine qu'un beau jour la donne changera.
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- Ce genre d'attaques arrivent-elles souvent ? M'enquis-je
Il gloussa. Puis il rit franchement. Enfin il se calma pour pouvoir prononcer :
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- Tu l'espères, n'est-ce pas ? Parce-que cela te rendrait le sel qui te manque, c'est cela ?
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- Peut-être bien, oui. Je ne vais pas te cacher ce que je suis...
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- Non, je suis comme toi, tout mon peuple l'est. Les vampires comme les lycans sont faits pour tuer, cela demeurera en dépit de tous les bons rois du monde entier. Pour te répondre, oui, ça arrive souvent. Depuis que je suis en place je m'amuse à noter les attaques... Ne bouge pas.
Il partit chercher quelque chose ; en attendant je fis couler un bain propre. Je sortis pour chercher des sels odorants, mais au bout d'un moment je sentis de nouveau la présence de Kenzo dans la pièce. A ma grande surprise il me souleva de terre pour me reposer dans le bain. En silence il vida le flacon que j'avais sorti dans l'eau avant d'y entrer à son tour.
Il me lut les dates ainsi que les récits des attaques. Il ne s'était pas passé un mois sans qu'une action n'avait été tentée. Ensuite sincèrement j'ignore ce qui se passa dans la salle de bain.
Je m'éveillai doucement ; tout de suite appréciai cet instant. J'étais entre des draps de soie, contre le roi. Une jambe entre les miennes, une main dans mes cheveux clairs, il m'observait de ses yeux jaunes avec un sourire pur. Sa tignasse trop longue flottait autour de lui, lui dégageant pour une fois le visage qu'il avait carré. Pour ma part j'avais un bras sur son flanc et les pieds refermés sur l'un des siens.
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- Nous n'avons pas... commençai-je.
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- Non, nous n'avons pas, sourit-il. Je te lisais mes exploits de guerre et tu t'es endormie, logique. Désolé, je ne le ferai plus.
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- Détrompe-toi, j'aime la guerre.
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- Tu n'as pas l'air de m'en vouloir de t'avoir couchée ici plutôt que chez toi.
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- Je peux difficilement faire ça alors que je suis nue entre tes bras.
Il sourit plus largement, posa un baiser au sommet de mon crâne, et me serra contre lui. Moi aussi, j'avais envie de lui, furieusement. Mais la trêve était terminée.