Lien vers Le péché pour leur vie pour les nouveaux venus.
On partit de l'arrêt au galop et côte à côte on sauta la rivière. Tout droit, le parcours était toujours tout droit, mais il y avait mille risques que ma monture refuse un obstacle, car la hauteur était impressionnante, surtout pour elle. En suspension (debout sur les étriers), couchée sur l'encolure, je murmurai à la pouliche en lâchant un peu les rênes et en serrant les talons : fonce, ma belle, Aiden a dit qu'il fallait foncer. C'est à moi de te faire confiance. Le premier saut fut parfait et je sus que tout se passerait bien. Tout droit, continuai-je de parler à son oreille, c'est parfait, ma belle. Tu es un ange, chuchotai-je encore, jolie fille, il n'en reste plus que six. N'aie pas peur de ce mur, de l'autre côté, il n'y a que toi et moi, encore et toujours. C'est bien, encore cinq, ma belle, parfait, parfait. L'oreille tournée vers moi, je voyais bien qu'elle était concentrée sur mes paroles apaisantes, tout comme, démesurément penchée vers l'avant, je n'avais d'yeux que pour cette oreille, et pour les obstacles, juste derrière.
Aussi à l'avant dernier obstacle je la vis vaciller. L'oreille quitta sa position pour se pencher comme l'autre en arrière, signe de colère. Je ne me tournai pas mais je sus que ma concurrente devait être juste derrière, ce qui n'était pas étonnant, nous volions à tombeaux ouverts au dessus des obstacles. Maintenait la pouliche avait peur de ce qui la poursuivait, et elle n'était plus concentrée ni sur moi ni sur les obstacles. Je récupérai un peu mes rênes et parlai un peu plus fort à ses oreilles, on était loin, je pouvais récupérer son attention avant l'échéance fatale. Allez, beauté, suppliai-je en serrant les jambes un peu plus, écoute moi encore, j'ai besoin de toi, s'il te plaît, aide moi comme je t'ai aidée avec ce crétin l'autre fois, fais ça pour moi, s'il te plaît, ma puce... L'obstacle était à deux foulées, elle ralentit, alors ne sachant plus que faire d'autre je hurlai : Allez ! Enfin son oreille se tourna vers moi. Elle se ramassa sur elle même et bondit. On allait renverser l'obstacle, c'était certain! Cela arriva, certes, mais au moins maintenant la pouliche m'écoutait. Fonce, fonce encore, c'est presque fini, dis-je doucement. D'une allure indéterminée elle récupéra le galop et fit un saut correct pour le dernier obstacle. Allez, criai-je, et on passa à fond de train la ligne d'arrivée. Du coin de l'œil je vis ma concurrente le faire quelques fractions de secondes plus tard.
Pas de cri, cette fois, car je ne savais pas si j'avais gagné ou pas. J'avais renversé un obstacle, combien de centièmes de secondes m'ajouterait on? Tu as gagné, annonça mon coach. Elle a raté un obstacle aussi. Oui, j'étais première! Étourdie de plaisir j'enlaçai l'encolure de la pouliche. Je passai encore une heure auprès d'elle dans son box, et avant de partir je lui fis la promesse de souvent venir la voir, quoi qu'il m'arrive dans deux jours. Un jour, rectifiai-je en me coulant entre mes draps, demain il ne restera que ce jour là.
Le lendemain je fainéantai jusqu'à ce qu'à treize heures on nous convoque pour l'épreuve de culture générale. Le sujet fut « le mal ». Je parlai du mal en philosophie, en Droit, je parlai de la morale, notamment s'agissant de la science, bref j'organisai le tout autour de la notion de relativité. Je sortis parmi les premiers, sachant que ce serait quitte ou double. En ces murs la relativité n'avait pas sa place, pourtant comment trancher autrement un sujet pareil?
Cette journée et la suivante je ne fis pas grand chose, sauf fuir mes propres pensées qui sans arrêt me ramenaient à Aiden, que j'espérais voir après les délibérations qui avaient lieu en ce moment même.
Je passai une nuit atroce mais enfin le grand jour arriva. Le cœur battant je me forçai tout de même à avaler un petit déjeuner mais le rendis peu après. Ce fut à cet instant que mon coach vint m'appeler en salle de conférence. Et ce que j'y entendis me fit battre le cœur.
« Bonjour, jeunes gens, commença la présidente. Comme vous l'avez certainement noté les deux dernières éliminations ont eu lieu, vous n'êtes plus que six. Je faillis hurler de joie d'encore être là mais cela eut fait désordre alors je me contentai d'écouter la suite. Vous vous doutez bien que tout cela n'était pas dans le but de créer une élite pour défendre le pays en cas de guerre. Il s'agit d'un secret autrement plus déconcertant, et j'espère que nous ne nous sommes pas trompés en vous choisissant pour remplir la tâche que l'on souhaite vous confier. La présidente chercha ses mots et haussa les épaules. Les vampires existent, lâcha-t-elle. Elle fit une pause pour voir l'effet de ses paroles.